Oman #1 : Le jour où je suis tombée sur l’hôtel de Shining

Il fait nuit noire, nous sommes seules à l’entrée du désert et nul part où dormir. Soudain, devant nous, un néon clignote. L’hôtel de Shining nous appelle.

Mais avant de vous parler de ça, reprenons du début.

Jour 1 et 2 : Arrivée à Mascate

Je suis partie 10 jours au sultanat d’Oman avec mon amie Sabrina pour fuir les touristes, épouser un Qatari et nous faire refaire les seins. Après un gros retard de notre avion à Bahreïn, nous arrivons de nuit à Mascate. Nous séjournons au Crowne Plaza qui depuis une corniche, domine tout le littoral. Nos journées consistent à manger notre propre poids en houmous et à essayer de ne pas se noyer à la piscine.

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Jour 3 : Camper sur les plages désertes

A Oman, le camping sauvage est autorisé pour peu que vous n’incendiez pas le pays. Nous partons donc ce matin-là faire le plein de matériel au grand mall à la sortie de Mascate et allons enfin conquérir les terres du milieu.

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Le long de la route, nous finissons par trouver une plage déserte et lunaire, encerclée de montagnes arides. Le vent souffle avec violence et nous met au défit de monter notre tente. Mais toutes ses heures passées à regarder Man VS Wild n’ont pas été vaines, je sais trouver du bois mouillé, oublier les sardines de la tente, allumer un feu avec un extincteur et dormir dans un chameau encore vivant. La tente montée, le sanglier sur la broche, notre camp prend forme peu à peu. Je fais ma toilette avec des lingettes pour lunettes et finit par m’endormir.

Le vent secourra la tente toute la nuit, les vagues seront en furie mais qu’importe, ce sera la plus belle nuit.

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Jour 4 : Nager sans se noyer dans Wadi Shab

Nous reprenons notre route le lendemain pour atteindre notre premier Wadi. Pour entrer dans l’oasis enchanté, il vous faut donner quelques pièces à un batelier (escroc ! ) qui vous fera traverser en quelques minutes l’étendue d’eau vous séparant du sentier. La randonnée dure moins d’une heure, le long de la palmeraie et des nombreux canaux d’irrigation.

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C’est en sueur que nous arrivons au bout du sentier, là où la baignade est autorisée. On s’élance dans l’oasis et remontons lentement les boyaux de la gorge. Je nage comme un labrador, ma queue comme gouvernail et atteint au bout de quelques minutes l’entrée d’une grotte. Le tunnel est à peine plus large que les épaules et vous conduit dans une  caverne turquoise où une petite cascade coule au milieu de celle-ci.

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Nous repartons les fesses trempées en direction de la ville de Sour avec la ferme intention de camper sur une nouvelle plage et ne plus jamais nous laver.

L’errance, le désespoir et soudain, l’hôtel de Shining

Mais à peine arrivées à Sour, un épicier nous révèle qu’il est strictement interdit de camper sur les plages de la côte Est, après Sour, à cause de la ponte des tortures marines. Donc à moins de pondre des œufs et de les enterrer dans le sable, nous ne sommes pas les bienvenues. Rien à faire, même enterrer nos ovules ne compte pas.

Après avoir désespéré longtemps sur un parking à la recherche d’un nouveau plan, nous décidons de nous enfoncer dans les terres arides et montagneuses du centre d’Oman pour planter notre tente, juste avant le désert qui sera notre prochaine destination. L’idée nous réjouit, nous partons ainsi à la tombée de la nuit. A cet instant, l’espoir ne nous a pas encore quitté. Mais évidemment rien ne pas se passe comme prévu. Au lieu de pénétrer dans la nature profonde, devant nous s’enchainent dans cet ordre : des raffineries de pétrole et de gaz, une centrale électrique, des zones en travaux, des grillages, des clôtures de barbelés, des routes en construction avec des engins de nuit, des zones d’essais nucléaire, le lieu de tournage de La colline à des yeux, une battue aux sangliers, la Dame Blanche… Puis soudain, après avoir dépassé la dernière agglomération, plus rien. Le désert commence. Le noir nous avale en une fois. On s’arrête, on panique. On se dit qu’au pire on dormira dans la voiture, on mangera les miettes sous le siège et on boira de l’essence.

Mais l’espoir renaît. Tout au loin, une petite lumière subsiste. Rapidement, nous nous approchons. Le néon bleu qui clignote nous confirme que c’est bien un hôtel. Il n’est pas répertorié sur notre carte, mais qu’importe, cette nuit nous dormirons là. Je ralentis la voiture et cherche l’entrée du parking dans le noir total. Je ne vois rien, je ne devine rien. Je m’enfonce à l’aveugle, traverse un fossé profond et m’approche de l’hôtel. Un bruit horrible arrête notre voiture. Je descends, me penche en dessous et vois une putain de barre de fer plantée dans le ventre du 4×4. Je tire avec force et finit par l’arracher. Maintenant un liquide s’échappe, mais tant pis. Après tout je n’y connais rien, c’est sûrement normal qu’un liquide noir coule d’une voiture.

Une fois garées, nous regardons autour de nous. Personne, pas une voiture sur le parking, pas une seule chambre d’allumée. Seule la réception scintille. Nous nous dirigeons timidement vers le comptoir. Là deux hommes nous attendent placidement en souriant. Je me lance :

  • « Bonsoir, nous voulons une chambre pour deux, la plus basique
  • Nous n’avons plus de chambre basique
  • Mais il n’y personne dans l’hôtel…
  • On n’en a pas.
  • Une moins basique ?
  • On n’en a pas.
  • Une grande ? une immense ?
  • On n’en a pas.
  • Une suite royale ?
  • On n’en a pas.
  • Vous avez quoi en fait ?
  • Juste cette chambre », nous répondent-ils en nous tendant la clé.

C’est sûr, ils viennent de nous refiler la chambre hantée. On ouvre la porte, tout est aseptisé. L’odeur de nettoyant est forte. Si quelqu’un est déjà mort ici, nous ne le saurons jamais…

Je meurs de soif et malgré le risque omniprésent, je décide d’aller chercher une bouteille à la réception. Je traverse cette immense hôtel, seule. Je me perds dans un couloir, un enfant sur un tricycle roulant sur une moquette orange m’indique mon chemin. Je finis par regagner ma chambre en vie.

Jour 4 : Cap sur Wadi Bani Khalid

Le lendemain matin, à notre réveil, nous vérifions nos orteils, nos doigts, nos cornées, notre virginité. Nous sommes en vie. La nuit a été très calme, il faut dire que nous étions les seules clientes de l’hôtel. Nous nous échappons discrètement.

Nous prenons rapidement la route en direction de Wadi Bani Khalid. La température est montée d’un cran, il temps de s’abreuver dans les flaques d’eau. A notre arrivée, nous sommes entourées de bananiers et de dattiers. Il est incroyable d’observer un tel jardin débordant au milieu du désert. Si on fait tomber un verre d’eau, trois palmiers poussent.

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Il vous suffit de marcher seulement une quinzaine de minutes pour atteindre les bassins d’eaux claires et vous baigner dans l’eau turquoise.

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Après quelques temps à nager dans cet oasis, nous devons déjà partir. Notre prochaine mission nous attend : dormir dans un camp dans le désert et prendre le commandement d’un groupe de bédouins.